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Un Rassemblement pour la Tunisie

dimanche 12 juin 2011

Par Hichem Skik

L’annonce de la création d’un Pôle démocratique et progressiste a soulevé un intérêt considérable dans notre pays-aussi bien dans les médias que parmi la classe politique et chez l’ensemble des citoyens. Les raisons d’un tel intérêt sont nombreuses.

D’abord, l’événement n’est pas banal dans le paysage politique tunisien. A part quelques tentatives de rapprochement entre certains nouveaux partis,- tentatives rarement réussies, souvent mort-nées ou peinant pour aboutir- la tendance générale aujourd’hui est beaucoup plus nettement à la multiplication du nombre des partis politiques. Profitant d’une application particulièrement libérale, depuis la révolution, de la loi sur les partis, après plus d’un demi-siècle d’une application restrictive, ou plutôt répressive, de nombreux citoyens intéressés, depuis longtemps ou depuis la révolution, par la politique ont, pour ainsi dire, « assouvi leur soif », non en adhérant, comme beaucoup d’autres, à l’un des partis existants, mais en créant leur propre parti. D’où l’allongement, jour après jour, de la liste des partis reconnus, liste qui approchera certainement la centaine. Il est, donc, dans ces conditions, normal qu’un rapprochement et un accord entre plusieurs partis attirent particulièrement l’attention comme étant une exception à cette tendance.

Une autre raison de cet intérêt pour le Pôle réside dans le fait que ce grand nombre de partis a créé, chez la majorité des Tunisiens, estimée entre 50 et 80%, une grande perplexité, voire une sorte d’inquiétude, qui va jusqu’à provoquer, chez certains d’entre eux, un désintérêt total pour les prochaines élections, faute de pouvoir distinguer, derrière la multiplicité des partis, des orientations et des programmes susceptibles de motiver leurs choix électoraux.

Il est donc normal aussi que la création du pôle soit reçue comme constituant une simplification du paysage politique, où commencent à apparaître des pôles qui se distinguent par des orientations générales assez distinctes : en gros, une orientation « islamiste », une orientation plus ou moins liée aux vestiges du RCD et une orientation à la fois démocratique et moderniste,aux composantes assez diversifiées (gauche, nationalistes arabes, libéraux…) dont une partie significative se retrouve dans le Pôle. Les choix possibles se trouvent, donc, pour le Tunisien moyen, singulièrement clarifiés.

La troisième raison est une conséquence de la précédente. Elle tient au désir profond de l’écrasante majorité de notre peuple, et plus particulièrement de notre jeunesse, de rompre radicalement avec la période passée, et en même temps, de ne pas renoncer aux acquis modernistes obtenus par plusieurs générations de Tunisiens et qui font, désormais, partie intégrante de leur identité.

Rien d’étonnant alors que l’annonce de la création du pôle démocratique et progressiste ait constitué, pour beaucoup d’entre nous, un signe d’espoir. L’espoir que cela permettra de lier clairement et efficacement la lutte pour les objectifs de la révolution, pour les valeurs de liberté, de progrès, de justice sociale… à la lutte pour la défense et la consolidation du Code du statut personnel, des droits de la femme, du droit positif, pour la séparation du domaine de la politique de celui de la religion etc. Nul doute que ces objectifs correspondent, et très profondément, aux intérêts de la Tunisie, aujourd’hui comme demain.